frise
1984 - 1987

La remontée


Les K

Après "First One" succédèrent 6 dessins à l'encre colorée au format A3, donc destinés à être partagés. C'est ce qui se passa mais exclusivement avec les jeunes. Le rejet était général de la part des adultes. Ils n'entrent pas dans le dessin. Ils restent dans leur tête à chercher des références.

Mais pour ma part, ce furent des jalons pendant ma reconstruction. Grâce à eux, je reprenais confiance en l'être demandant à vivre en moi. Il me guidait. Un mois après avoir terminé le 5ème K, en regardant les photocopies, j'ai songé à la Laponie. Deux mois plus tard, j'avais tout largué et je me laissais guider sous le soleil de minuit, vendant un dessin de temps en temps. Je ressentis alors la liberté intérieure de l'être qui nous habite.


Plaur et le suicide des jeunes.

Après avoir signé Luk pendant 12 ans, je choisis un nom d'artiste différent en 1984.

Pour distinguer les oeuvres issues de ma recherche intérieure de celle sur commande que la survie matérielle me pousse à effectuer, mais aussi pour donner un sens à mon travail.

Cet été-là, je marchais dans une rue piétonne, quand une jeune fille me croisant pila net me regardant comme un extra-terrestre. Je haussais les épaules, encore bien replié en moi-même.

A la rentrée, avec un vieil appart - atelier, je me faisais connaître pour mes cours. Pendant l'hiver, un groupe de jeunes élèves arrive catastrophé. Leur amie Aurélie s'était pendue sur un fond de Hendrix.

Ce n'est qu'un peu plus tard que je vis des photos et reconnus la jeune fille de l'été que j'avais rejetée alors que me sentant diminué, il devait rester quelque lueur de vie qui puisse interpeller quelqu'un qui se refuse à devenir une marionnette.

Ma nouvelle vie prenait un sens.

Avec l'idée d'un personnage BD créé dans les 70's nommé PLOR, je crée PLAUR en hommage à Aurélie, suicidée pour des raisons que je perçois proches de celles de mon alcoolisme.


Le dessin

En 86, je retrouvais ma prof de dessin qui me rendit le dessin la ligne de 72. Elle l'avait conservé, le jugeant intéressant. Réel encouragement à développer ce que je pratique depuis toujours, le gribouillage-graphisme.

Mais là, je me mis à l'épurer et réalisais des milliers de lignes au format 10x15 cm, avec l'obsession de ne pas tricher, de laisser sortir une expression intérieure inconsciente. Ecriture automatique ? Peut-être. Toujours est-il que de l'abstraction apparurent au fur et à mesure des visages et des compositions. Il ne fallait pas brusquer le mouvement. Celui-ci une fois acquis, me permit de mixer réflexion et abandon à quelque niveau que je touche une oeuvre. Et je continue à gribouiller quotidiennement, à faire mes gammes. Entretenir le feeling.


Influences

Prince me redonne goût à la danse.

Gandhi, Le livre de l'épreuve (soufi), Lanza del Vasto, les Evangiles.

Métal Hurlant, Actuel toujours, Avoriaz fantastique.

Un passage d'un livre datant de 1967: L'art psychédélique de Robert E.L. Master's et Jean Houston :

" Ce dont nous avons désespérément besoin - même si nous sommes les derniers à l'admettre - c'est d'un art qui nous aiderait à organiser notre manière de voir dans un monde faussé (bien que d'une manière moins manifeste que le monde dévoilé par l'expérience psychédélique). Le monde dans lequel nous vivons, nos institutions, nos rapports sociaux, notre façon d'aimer, nos réactions humaines, tout cela est tellement dénaturé qu'il peut sembler plus facile d'achever le massacre que de créer une façon de comprendre, et de percer un chemin qui conduirait à des structures significatives et à des valeurs durables."

Cela donnait un sens à mon vécu que je reliais ainsi à cette démarche graphique que je redécouvrais. Je compris petit à petit pourquoi l'expérience psychédélique avait été rapidement rangée au placard. On ne peut à la fois paraître et se soumettre pour s'assurer une bonne place dans le train et explorer son être intérieur avec le risque de se retrouver en totale contradiction avec sa vérité. Et alors, commence la course en avant pour fuir la réalité. A tout prix!

Avec la loi de 1970 interdisant de parler positivement des drogues illégales,( pas les légales bien sûr, celles qui abrutissent et rapportent ), comme si tout était noir ou blanc, à tout moment, à tout endroit, à tout âge, en toutes circonstances, la fuite en avant continue. L'Histoire jugera.